Saint-Clair-sur-Epte : Le Traité

Le paisible bourg de Saint-Clair-sur-Epte a acquis une renommée nationale par le traité qui y fut signé en 911 entre le roi de France et un chef viking.

Lien vers la carte : Saint-Clair-sur-Epte

Le 12 mai 84, une flotte danoise menée par le viking Oscher réussit à remonter le cours de la Seine. Rouen et Jumièges sont pillées et incendiées. Commence alors une longue période durant laquelle le fleuve va se trouver sillonné par les knarr, ces bateaux dont la proue arborait un drakkar, une tête de dragon. Les norois qui les conduisent sèment la terreur jusqu'à Paris. En 845, Ragnar Lodbrok assiège la capitale avec 120 navires. Charles II le Chauve, alors roi de Francie Occidentale, doit payer une rançon de 7 000 livres d'argent pour s'en débarrasser. Malgré ce danegeld, ce tribut, la capitale est de nouveau pillée en 856, 861, 885 et 911.

Les descendants de Charlemagne ne peuvent se dépêtrer de ces raids barbares. Ils doivent faire face aux féodaux qui veulent s'émanciper de la suzeraineté du roi, aux Bretons qui veulent étendre leur territoire, à l'Aquitaine qui souhaite reprendre son indépendance et aux scandinaves qui harcèlent ses sujets de Neustrie. C'en est trop. Le 28 décembre 898, Charles III dit le simple. soit l' honnête, réussit à battre une bande d' hommes du Nord, des Normands. En 911, ceux-ci assiègent de nouveau Paris ainsi que Chartres. Là, le roi remporte une nouvelle victoire le 28 août. Il décide alors de négocier avec le chef viking Hrolfr, Rollon.

Les pourparlers sont menés par l'archevêque de Reims et la rencontre entre les deux parties se tient donc à Saint-Clair-sur-Epte. Les chroniques concernant cette époque sont rares. Les "Annales de Saint-Vaast" s'arrêtent en 900 et les suivantes, celles du chanoine Flodoard débutent en 918. Aussi certains doutent de la date du traité. Pourtant, la chronique d'Hugues de Fleury situe la bataille de Chartres le samedi 13 des calendes d'août, ce qui ne peut correspondre qu'à l'année 911.

Rollon est surnommé le marcheur. La saga des Orcadiens l'explique par sa grande taille qui lui aurait interdit de monter à cheval. Plus prosaïquement, il s'agirait plutôt de rappeler ses pérégrinations qui le conduisirent de la Norvège aux Orcades puis en Francie.

Le roi et le duc des Francs Robert, se tiennent sur la rive gauche de l'Epte; Rollon et son armée campent sur la rive droite. L'accord est topé. Il prévoit que le roi de France remet à Rollon "la terre qui avait été convenue, en bienfonds et en alleu, depuis le fleuve Epte jusqu'à la mer, et toute la Bretagne afin qu'il pût en vivre". En contrepartie, le Normand devait embrasser la religion chrétienne, sauvegarder le royaume et épouser une fille de Charles III, une certaine Gisèle dont nul ne semble connaître l'existence. La légende raconte qu'il était d'usage que le pied du roi soit baisé par ceux qui en recevait un don. Rollon n'aurait pas voulu se soumettre à cette coutume. Il aurait demandé à un de ses guerriers de le faire à sa place. Ce dernier aurait fait choir le roi, déclenchant l'hilarité des Normands. Il semble peu probable que cette scène eût lieu. Néanmoins il est certain que le premier duc de Normandie ait été baptisé en 912. Il respectera l'accord et lui, l'ancien pilleur barbare, établira une législation particulièrement sévère envers les voleurs et autres criminels. Les Normands primitifs vont se convertir, épouser des françaises, s'assimiler en perdant l'usage de leurs idiomes en faveur du roman et reconstruire ce qu'ils avaient détruits.
En 911, Saint-Clair-sur-Epte était rentrée dans l 'Histoire de France.

Rédaction : T. Maille 04/2021