Nucourt : Les carrières à V1 allemands

Le GR 11 nous conduit vers les carrières de Nucourt (1). Du moyen-âge à l'époque actuelle, elles ont connu une histoire chargée...

Lien vers la carte : Magny-en-Vexin

Le banc calcaire, dont l'exploitation à Nucourt remonte au Moyen-Âge, a servi à l'édification des églises qui parsèment la région. Son épaisseur oscille entre 12 et 18m, il est daté du Lutétien moyen. Le calcaire y est plus ou moins grossier et résulte de l'accumulation de petits organismes unicellulaires constitutifs du plancton marin, les Foraminifères, dont la famille des Milioloidés prédomine ici. Nous sommes en présence de dépôts effectués lorsque la mer lutétienne a été la plus profonde. L'exploitation de ce banc avait duré un millier d'années lorsque les troupes allemandes ont investi les lieux.

L'Opération Crossbow
Le Royaume-Uni, et plus particulièrement Londres, a subi l'effroyable Blitz dès le milieu du conflit. Après la défaite de Stalingrad menée par de l'armement classique, Hitler force ses savants et ingénieurs à plancher sur des armes nouvelles. Les alliés occidentaux se sont dotés d'une palette d'aéronefs à long rayon d'action et bombardent sans répits les villes allemandes tandis que le régime nazi qui a omis cette stratégie ne dispose pas d'appareils semblables. Aussi, pour le Führer l'heure des représailles sonne. Ainsi naissent les V1, Vergeltungswaffe.

L'état-major allié reste assez dubitatif quant à la réalité de ces bombes volantes autopilotées, les premiers missiles de l'Histoire. Grâce à l'action des réseaux de résistance polonais et français, la réalité de l'existence de ces armes devient patente et une action urgente s'impose. Elle sera codée "Bodyline" puis "Crossbow".

Le V1, qui révolutionne la tactique aérienne, est néanmoins simple dans sa conception. Les pièces détachées arrivent des lieux des usines de production des arrières puis sont acheminées par le rail vers des centres de montages. L'organisation nazie se met à la recherche de sites pouvant assurer la discrétion de leurs manœuvres et jettent leur dévolu sur les carrières de Saint-Leu-d'Esserent (code Léopold), de Rilly-la-Montagne dans la Marne (code Richard) et de Nucourt (code Nordpol).
Nucourt, reçoit les éléments de montage par la ligne de train Chars-Magny. Une vingtaine de V1 sont assemblés chaque jour et un millier y sont stockés ainsi que des torpilles de sous-ma
rins. 2 500 personnes y travaillent jour et nuit, des réquisitionnés locaux comme des prisonniers. Mais des renseignements obtenus soit par la résistance française soit par des éléments infiltrés permettent aux alliés de déclencher les bombardements. Le 22 juin 1944, 70 avions B47 américains réalisent une première frappe peu efficace. La seconde a lieu le 15 juillet avec une flotte de 47 Lancaster et 16 Mosquito. Les premiers sont porteurs d'une bombe spécifique de 5 tonnes qui, larguée à 5400 m d'altitude permet de traverser 30m de roche ! Après cette deuxième offensive, le Bois des Jardins prend un aspect lunaire ; 80% du village est détruit mais la base de V1 n'est plus qu'un souvenir.

À la suite de cet épisode tragique, la carrière va avoir une vie plus calme, accueillant des champignonnistes pendant 23 ans puis un site d’accueil, actuellement en restauration.

Pour en savoir plus :
https://grotteur95.skyrock.com/4.html

Rédaction : Thiéry Maille 09/2020